Le 9 octobre 2025, jour symbolique s’il en est, Robert Badinter rejoindra le Panthéon, ce mausolée des gloires françaises. Ce n’est pas un hasard : c’est précisément à cette date, en 1981, que la loi abolissant la peine de mort fut promulguée. L’ancien garde des Sceaux, figure emblématique de la gauche mitterrandienne, y sera inhumé avec tous les honneurs. Une cérémonie qui, en effet, se veut un hommage vibrant à son combat acharné contre la guillotine, cette machine infernale qui hantait encore les assises françaises jusqu’à la fin des années 70.
Badinter, avocat de formation et rescapé des horreurs de la Seconde Guerre mondiale – son père fut déporté et assassiné à Sobibor –, avait fait de l’abolition son cheval de bataille. En 1981, face à une Assemblée nationale divisée, il prononça un discours historique, remuant les consciences par ses mots simples et percutants. "La mort ne rend pas la justice plus efficace", avait-il lancé, citant des exemples glaçants de condamnés innocents. Résultat : 363 voix pour, 117 contre à l’Assemblée ; le Sénat suivit de près. De plus, cette loi marqua la fin d’une ère, celle des dernières exécutions publiques, comme celle de Christian Ranucci en 1976, qui avait déjà semé le doute.
Mais la panthéonisation va plus loin. L’Élysée a prévu un programme chargé : une procession dans la rue Soufflot, des lectures de plaidoiries badinteriennes, un extrait des Choses vues de Victor Hugo récité par Guillaume Gallienne, et même une chanson de Julien Clerc pour clore l’événement. Avant cela, une veillée funèbre aura lieu le 8 octobre au Conseil constitutionnel, où Badinter présida de 1986 à 1995. Emmanuel Macron, qui avait promis cette entrée au Panthéon dès l’annonce de sa mort en février 2024, y verra un moyen de raviver le débat sur les droits humains. Toutefois, dans un pays où la peine de mort reste un sujet sensible – on le voit avec les sondages qui fluctuent –, cet hommage pourrait bien raviver des controverses.
En somme, cette soirée au Panthéon n’est pas qu’une commémoration ; elle interroge notre rapport à la justice aujourd’hui. Et si l’héritage de Badinter nous poussait à repenser, une fois de plus, ce que signifie punir au nom de la société ?