Hervé Bazin : le mythe de Folcoche ébranlé par une enquête implacable

Hervé Bazin : le mythe de Folcoche ébranlé par une enquête implacable

En cette fin septembre 2025, un livre-enquête fait l'effet d'une bombe dans le monde littéraire français. Émilie Lanez, journaliste chevronnée, y démonte pièce par pièce le récit soi-disant autobiographique d'Hervé Bazin dans Vipère au poing, ce roman culte paru en 1948 qui a vendu plus de cinq millions d'exemplaires et forgé l'image d'une mère monstrueuse, Folcoche.

De plus, Lanez ne se contente pas de relire les lignes de Bazin ; elle fouille les archives familiales et policières pour révéler une tout autre histoire. En effet, la mère de l'écrivain, Paule Guilloteaux, n'aurait pas été cette ogresse impitoyable décrite avec tant de venin. Au contraire, les documents montrent une femme plutôt stricte, certes, mais aimante à sa manière, loin de la caricature haineuse. Bazin, lui, apparaît sous un jour bien sombre : un homme aux multiples mensonges, un psychopathe constitutionnel selon certains témoignages, qui a réécrit son passé pour se venger d'une famille qu'il détestait.

Toutefois, cette révélation soulève des questions embarrassantes. Comment un tel succès, traduit en trente langues et adapté au cinéma, a-t-il pu reposer sur une mystification ? Lanez pointe du doigt les impostures de Bazin, depuis son enfance à Angers jusqu'à sa présidence de l'Académie Goncourt pendant vingt-trois ans. De plus, elle s'appuie sur des lettres et des photos inédites pour montrer que l'écrivain a délibérément occulté ses propres errements – mariages tumultueux, sept enfants, une vie de bohème chaotique. En effet, Vipère au poing n'était pas un cri du cœur, mais une vengeance calculée contre une mère qu'il accusait injustement d'avarice et de cruauté.

Le livre, sorti aux éditions du Seuil, n'a pas fini de faire des vagues. Des critiques fusent déjà, certains défendant l'œuvre comme fiction pure, d'autres saluant cette réhabilitation de Folcoche. Et Bazin, mort en 1996, ne peut plus se défendre. Cette affaire rappelle combien la littérature peut déformer la réalité, invitant à se demander si l'art justifie toujours les mensonges qu'il charrie.

Partager cet article